Au printemps dernier, la justice a tranché. Aux yeux de la Cour
supérieure du Québec, une focaccia est légalement une pizza. Qu’est-ce qui a
bien pu amener notre système judicaire d’ajouter cette décision à son menu? Un
conflit entre les franchises Mikes et Trattoria Tevere situées dans la foire alimentaire du Complexe Desjardins à Montréal. Voici les détails croustillants.
Être ou ne pas être une pizza, là est la question |
L’affaire alla donc devant les tribunaux. Pour le maître Marco Vitale,
qui assura la défense de la Trattoria Tevere et qui représente régulièrement
des restaurateurs, c’était la première fois qu’il devait argumenter sur la
définition légale d’un met. Il appela donc à la barre des témoins les experts
en définition : les dictionnaires. Une pizza a une pâte pétrie, arrondie,
travaillée avec une technique propre, alors qu’un focaccia est généralement un
pain constitué d’une base d’huile d’olive. Malgré cela, le 9 mars 2015, l’honorable
juge Pierre Labelle indiqua que :
« Dans la mesure où la focaccia constitue une base de pain recevant des garnitures, elle possède les attributs d’une pizza, a ajouté le juge. Trattoria Tevere vend des pizzas [...] sous d’autres vocables. »
Il est effectivement difficile d’argumenter contre le fait qu’une « foccacia-pizza » a les attributs d’une pizza, mais ce n’est pas ce qui est souligné dans le jugement ci-haut : Base de pain avec garniture = pizza. Quel précédent un tel jugement peut-il constituer? Est-ce qu’aux yeux de la loi, une lahmadjoune est une pizza? Et une tourte? Un sous-marin? Ma tranche de beurre de pinottes?
La pizza a une si grande place dans l’alimentation américaine qu’elle est considérée comme un légume. En fait, il s’agit plutôt de la
sauce tomate qui entre dans la catégorie des légumes : un huitième de
tasse équivaut à une demie tasse de légumes frais. Les deux cuillères à soupes
présentes dans la sauce à pizza en font donc une portion de légumes.
Qu’elle que soit sa définition aux yeux des juristes, la décision du
tribunal a laissé un goût amer à Monsieur Abdallah. Bien qu’il puisse continuer
à vendre des focaccias tant qu’elles ne contiennent pas de fromage ni de sauce
tomate (donc moins nutritives pour les touristes américains), son chiffre d’affaire
a baissé de 45 à 50% environ. Après des dépenses de 250 000$ afin de tout
changer son affichage et une récente hausse de loyer de 3000$, il n’a plus les
moyens de payer pour les frais légaux qui lui permettraient de défendre sa
cause davantage. La prochaine fois que vous passez par-là, achetez-lui donc une
focaccia, ça va aider à la digestion.
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