Chaque année, lorsque le
printemps pointe le bout de son nez et que le beau temps revient, il n’est pas
long que les adeptes de la moto s’empressent d’enfourcher leur monture de fer
afin de parcourir les routes. En ce début de saison, il est donc important de
se rappeler les consignes de sécurité afin de ne pas partir pour un plus long
voyage encore. Tant qu’à être prudent, pourquoi ne pas également demander un
peu de protection divine?
Le 28 mai dernier avait lieu à
l’Oratoire Saint-Joseph la 36e édition de la bénédiction annuelle
des motocyclistes. Tous rassemblées sur son large stationnement, les membres de
diverses associations de motocyclistes se côtoyaient, admirant les motos de
leur semblable tout en attendant la venue des prêtres. L’événement est organisé
par Moto Internationale, un important concessionnaire de la ville, mais peu de
gens savent qu’ils sont appuyés dans leur démarche par un club de moto bien
particulier, les Widow’s Sons, formé entièrement de francs-maçons.
Membre des Widow's Sons ayant
la franc-maçonnerie dans la peau
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Ces motards sont
reconnaissables par leur insigne incluant plusieurs symboles, telle que la
pyramide symbolisant l’ascension et les 3 degrés maçonniques, le soleil à son
sommet pour la quête d’illumination, l’œil au centre afin de représenter le
regard constant du Grand Architecte de l’Univers et les ailes pour la quête de
liberté. Leur nom, signifiant « Fils de la Veuve » se réfère à l’une des
légendes fondatrices de la franc-maçonnerie, celle du meurtre d’Hiram Abiff,
architecte du Temple de Salomon assassiné pour avoir refusé de révéler ses
secrets à des ouvriers jaloux. Hiram était également surnommé le « fils de
la veuve », ayant comme mère une veuve de la tribu de Nephthali, l’une des
12 tribus d’Israël. Les francs-maçons poursuivant l’œuvre d’Hiram, ont donc
reprit son surnom.
L’association du club de
motards avec la veuve va cependant plus loin. Comme me l’explique le Maître
Maçon Wayne Houlzed, membre des Widow’s Sons, leur club a pour mission de
prendre soin des veuves et des orphelins de leurs frères maçons. Les temps
étant moins durs qu’au début de la maçonnerie, l’argent amassé par les différentes
levées de fond auxquelles ils participent se voit redistribuée afin de prendre
soin des enfants en général. Beaucoup de membres du chapitre québécois étant
également Shriners, les fonds sont souvent donnés à l’hôpital Shriners pour enfants de
Montréal. Lors de la journée de bénédiction, un jeune garçon originaire du
Ghana présentement traité à Montréal rappelait aux motards de toute horizon l’importance
de donner généreusement. Ces derniers ont pu le faire en participant à un
moitié-moitié et une collecte de jouets, le tout organisé par les Widow’s Sons.
C’est probablement grâce à de
tels gestes de charité qu’un événement organisé par francs-maçons puisse
aujourd’hui avoir lieu sur le terrain de l’Oratoire St-Joseph. En effet la
relation entre l’Église Catholique et la confrérie n’a pas toujours été très
bonne au siècle dernier, les maçons ayant milités pour une séparation de l’Église
et de l’État. Le climat social est maintenant bien différent et tel que l’explique
Patrick Vézina, vice-recteur à la pastorale, l’Oratoire est un lieu ouvert à
tous peu importe les croyances. De tels événements telle qu’une bénédiction des
motocyclistes n’a rien d’étranger pour lui; quelques semaines plus tôt avait
lieu une bénédiction spéciale pour les propriétaires de voitures Mustang! Bien
qu’une bénédiction générale s’adressant à tous et ne prenant que quelques
minutes serait efficace spirituellement parlant, Monsieur Vézina et d’autres
membres du clergé prennent toutefois le temps de passer entre les rangées de motos afin de les bénir individuellement ainsi que leur propriétaires Il explique
que ce service personnalisé est demandé par la population, qu’elle a besoin de
concret, de symboles qui laissent une certaine trace telle que l’eau bénite
trempant encore leur moto lors de leur départ du stationnement.
Patrick Vézina effectuant une bénédiction |